Nous avons plusieurs exemples d’utilisation de la souveraineté monétaire qui ne sont pas orientés vers le bien-être de la collectivité : le Quantitative Easing (QE) en est un prototype parfait. Aux yeux de beaucoup, c’est l’expression maximale de ce que peuvent faire les États dotés d’une souveraineté monétaire. Mais, en réalité, c’est un instrument totalement inadéquat pour réduire le chômage. Les détracteurs de la MMT prétendent que le QE est la preuve parfaite que « l’impression de la devise nationale, comme le dit la MMT, ne fonctionne pas ». Ils prouvent ainsi qu’ils ne connaissent pas la MMT.
Le QE est un outil inadéquat pour réduire le chômage pour deux raisons, qui sont liées aussi bien à sa philosophie qu’au mécanisme de création de crédit par les banques.
L’objectif du QE n’est pas le financement direct d’une intervention des dépenses publiques, mais la stimulation du crédit dans le secteur privé, crédit qui doit alimenter les dépenses des entreprises et des ménages.
En réalité, le QE consiste en l’achat, par la Banque centrale, de titres d’État déjà émis par le Trésor ; en échange, celle-ci « modifie le chiffre » des comptes de réserve que les banques ont auprès de la Banque centrale. Sur le plan opérationnel, il s’agit du transfert des chiffres d’un compte de dépôt (obligations d’État) vers un compte de réserves (à la Banque centrale). Il n’y a pas de création d’Actifs Financiers Nets. Au contraire, l’opération soustrait du système économique les revenus d’intérêts que le détenteur des titres reçoit, absorbés par la banque centrale en même temps que le titre. Elle ne permet donc pas d’augmenter la production nette des agents, ni de se procurer davantage de devises nationales dans le but de payer les impôts. Elle ne fait en réalité que diminuer le déficit public en réduisant les taux d’intérêt sur les titres d’État, ce qui en soi constitue de l’austérité.
Le deuxième point concerne les attentes relatives au QE en tant que stimulant de l’économie réelle, fondées sur la croyance erronée que, dans le décaissement du crédit, les banques commerciales sont liées au mécanisme du « multiplicateur monétaire ». Selon cette hypothèse erronée, les banques créeraient et accorderaient du crédit comme un multiple des réserves bancaires détenues par la Banque centrale ; par conséquent, à la suite d’une augmentation (consécutive au QE) de l’entité de ces réserves, les banques créeraient proportionnellement plus de crédit. Mais cela ne correspond pas à la réalité. En fait, il n’existe pas de chaîne de transmission directe qui, partant de l’expansion des réserves bancaires, conduirait à une augmentation des volumes de crédits accordés au secteur privé. Les banques ne prêtent pas de réserves aux clients, et elles ne prêtent plus en raison de l’augmentation des réserves.
Par conséquent, comme le dit Warren Mosler,
le QE ne rétablit pas la demande globale, mais se contente de repositionner les actifs financiers. Il fonctionne sur les prix (taux d’intérêt) et non sur les quantités.
Enfin, la MMT n’a jamais proposé le QE for the people. Des MMTers ont pu avoir des contacts avec ceux qui l’ont proposé. Ainsi, Warren Mosler a eu l’occasion de s‘exprimer sur ce sujet, défendant l’idée selon laquelle le QE est une politique monétaire, tandis que la politique budgétaire, s’appuyant sur le déficit public, lui est de loin préférable pour stabiliser l’économie.
Texte original par Daniele Basciu, – Rete MMT Italia, traduit et adapté par Robert Cauneau – MMT France.